Dans une interview accordée à Tchadinfos, le politologue Yamingué Betinbaye a analysé le récent rejet provisoire des candidatures de certains cadors du Mouvement patriotique du salut (MPS), dont Mahamat Zen Bada, Secrétaire général du parti, aux élections législatives prévues pour le 29 décembre prochain. Cette décision a été prise par l’Agence nationale de gestion des élections (ANGE), suscitant des réactions au sein de l’espace politique tchadien.
Le politologue Yamingué Betinbaye souligne qu’il y a une amélioration significative des capacités techniques des acteurs politiques au Tchad, avec une réduction du taux de rejet des candidatures, passant de 50 % à environ 9 % pour les élections récentes. Cela indique une plus grande confiance envers le processus électoral, malgré les critiques persistantes sur la crédibilité de l’Agence nationale de gestion des élections (Ange).
Il rappelle que sur près de 300 partis politiques, environ 180 ont soumis des candidatures, ce qui représente plus de 50 % de participation. Toutefois, les candidatures rejetées proviennent principalement d’acteurs influents du parti MPS, ce qui soulève des questions sur la régularité et la responsabilité au sein du parti. « Avec certains dossiers rejetés, il semble que l’Agence ait peut-être gagné en objectivité et en crédibilité. Toutefois, il est bien connu que le paysage politique est impitoyable. Si ces rejets ne cachent pas d’agendas secrets ou de rivalités internes, cela pourrait réellement renforcer la crédibilité de l’Agence », pense l’analyste.
Dr Yamingué Betinbaye indique que les candidatures rejetées proviennent principalement d’acteurs bien connus et du MPS, souvent perçu comme le parti dominant. Il est donc surprenant que des figures clés comme le Secrétaire général de ce parti ou certains maires aient vu leurs dossiers affectés par des irrégularités. « Nous devons maintenant attendre le jugement des instances électorales : le Conseil constitutionnel pour les législatives et la Cour suprême pour les municipales. Cependant, nous savons que des influences politiques persistent au sein de ces institutions, ce qui suscite notre scepticisme », fait-il remarquer.
Pour le politologue, dans l’ensemble, les institutions électorales ont été largement critiquées depuis le référendum jusqu’à la présidentielle en raison des doutes sur leur transparence, leur caractère démocratique et leur crédibilité. Beaucoup d’acteurs politiques se sont retrouvés exclus du processus à cause du manque de confiance envers ces institutions, tandis que d’autres se sont retrouvés intégrés alors qu’ils auraient dû être écartés. Et cela a entaché la crédibilité des institutions électorales, notamment celle de l’Agence nationale de gestion des élections. « L’Agence doit vraiment travailler à rassurer l’opinion publique ; bien que ces rejets puissent apporter un certain réconfort, les expériences passées alimentent toujours des doutes jusqu’à la publication d’une liste définitive », explique-t-il.
Il faut rappeler que Mahamat Zen Bada, Secrétaire général du parti MPS et acteur majeur de la politique, a vu sa candidature pour le département d’Abtouyour rejetée. L’Agence nationale de gestion des élections a relevé deux motifs le disqualifiant : une condamnation à cinq ans de prison en 2012 et l’absence de preuve de sa mise en disponibilité de la Police. Ainsi, contre toute attente, il ne pourra pas se présenter, malgré ses plus de 40 ans d’expérience politique.