Reed Broody, avocat américain et défenseur des droits humains, a été expulsé du Tchad après que les autorités aient interdit une conférence qu’il devait animer sur les indemnisations des victimes de l’ancien président Hissein Habré.
Dans une interview exclusive accordé à Tchadinfos, Broody a expliqué qu’il était venu au Tchad principalement pour se renseigner sur l’état des indemnisations des victimes du régime de Habré, reconnu coupable de crimes contre l’humanité. Il avait été invité par l’ambassade des États-Unis et le Centre de formation et d’action pour le développement (Cfod) pour animer une conférence-débat autour de son livre retraçant deux décennies de combats aux côtés des victimes.
Alors qu’il se préparait à donner la conférence prévue à 14h30, Broody a été informé par le directeur du Cfod que les autorités avaient ordonné l’interdiction de l’événement. « Nous avons été regroupés dans une salle avec des hommes en uniforme qui nous ont dit qu’ils avaient des ordres d’interdire la conférence », a-t-il déclaré. Malgré ses protestations, il a été escorté par les agents des services de renseignement.
Lors de leur détention d’une durée de deux heures, les autorités lui ont demandé pourquoi il n’avait pas sollicité d’autorisation pour l’événement. Broody a expliqué qu’il ne pensait pas avoir besoin d’une telle autorisation, étant donné que la conférence était organisée par l’ambassade des États-Unis. Selon lui, le gouvernement tchadien semblait préoccupé par le potentiel de revendications des victimes, qui se battent depuis plus de vingt ans pour obtenir justice et réparations.
Les indemnisations attribuées aux victimes par les tribunaux s’élèvent à 10 milliards de francs CFA, un montant que Broody considère insuffisant par rapport à ce que la justice leur a accordé. « Les victimes attendent encore le reste », a-t-il ajouté.
Dans cette conférence annulée, Broody souhaitait mettre en lumière l’héritage du procès Habré et son impact à l’échelle mondiale, rappelant que son modèle avait inspiré des initiatives similaires en Afrique. « Ce n’était pas une conférence revendicative, mais un débat sur la mémoire et l’impact du procès sur la société tchadienne », a-t-il précisé.
Malgré cette expulsion, Broody a exprimé son amour pour le Tchad, soulignant ses nombreuses visites au pays et les amitiés qu’il y a tissées. « Je viendrai toujours au Tchad si on m’invite », a-t-il affirmé avec conviction.